Le barré
Il existe, dans l’apprentissage de la guitare, un obstacle majeur, une étape incontournable qui fait perler les gouttes de sueur sur le front des apprentis musiciens… Le barré. Cette action d’allonger et d’appuyer l’index sur le manche, de sorte qu’il en recouvre la totalité, est en effet perçue comme un supplice de Tantale, qui en découragea plus d’un d’aller plus loin. Et pourtant, Kurt Cobain lui-même a déclaré un jour qu’il avait arrêté les cours de guitare le jour où il avait compris qu’en décalant les positions en barré sur le manche, il pouvait retrouver tous les accords… Ce qu’il ne priva pas de mettre en pratique avec le succès qu’on connaît. Mais alors, c’est facile ou c’est difficile ? C’est à n’y rien comprendre… Tâchons d’y voir plus clair. Continuer à lire
La vie sans barré
Les accords relatifs
Rien ne sert de plonger trop tôt dans le grand bain avant de savoir nager, c’est parfois le meilleur moyen de se décourager. S’il s’agit de chanter en s’accompagnant à la guitare, le capodastre peut permettre d’explorer pas mal de tonalités en ayant le moins de barrés possible… Mais si, malgré tout, barré il y a ? Comment faire ?
Quelquefois, remplacer l’accord incriminé par son accord relatif, le fa par un ré mineur par exemple, (puisque l’accord en question est souvent un fa) peut permettre de contourner le problème.
Sur No Woman No Cry de Bob Marley par exemple, ça donnera :
Do M / Sol M / La m / Ré m
Do M / Ré m / Do M / Sol M
Évidemment, on transforme un peu l’harmonie du morceau, et les oreilles les plus aguerries (et les plus tatillonnes) ne manqueront pas de vous le faire remarquer… Mais dites-leur qu’à chaque jour suffit sa peine, compensez cette lacune par la ferveur de l’interprétation, et ça passera tout seul.
Tableau des accords relatifs.
Les positions « simples »
Et ce fameux Fa Majeur, souvent le premier à intervenir, et qui freine tant de vocations… « Si l’on pouvait le jouer autrement, ce serait quand même plus simple », serait-on tenté de se dire. Eh bien, c’est possible ! A condition bien sûr de ne pas jouer toutes les cordes. Voici deux positions simplifiées du Fa Majeur. Inutile de dire qu’au même titre que les accords en barré, elles se décalent sur le manche.
2 positions simplifiées pour le Fa Majeur.
Le Pouce !
Oui : L’usage du pouce de la main gauche, en adaptant quelques positions, peut enrichir votre jeu et vous épargner certains barrés douloureux. En voici quelques exemples : Le Fa majeur en barré, puis avec le pouce (« T » = pouce), et le si bémol majeur en barré, puis avec le pouce.
(Notons que pour le sib pouce, ça se complique un peu… Il s’agit quand même de faire un petit barré de 3 cases. Mais nombre de guitaristes ont adapté ce type de position… A tester donc !)
On peut d’ailleurs remarquer sur cette vidéo de Jimi Hendrix, clôturant le festival de Woodstock au petit matin par une longue improvisation à la guitare, à quel point il a su tirer partie de l’usage du pouce…
Ce qui ne le dispense pas de faire pas mal de barrés. Et, donc, ne résout pas notre problème. Continuons…
Le barré
Jetons-nous dans le bain… Qu’est-ce que le barré ? Quelle est son utilité ? Pourquoi tant de souffrance ?
Prenons notre position de Mi Majeur et décalons la d’une case : les doigts de la 2ème case seront sur la 3ème case, et ainsi de suite. Faisons cette position avec majeur, annulaire et auriculaire pour libérer l’index… Qui, lui, s’étalera tout en long sur la 1ère case.
En procédant ainsi, nous décalerons toutes les notes d’un demi-ton vers le haut. Nous aurons un Fa Majeur, puis si nous décalons encore l’ensemble d’une case, nous aurons un Fa# Majeur… Puis un Sol… Et ainsi de suite. C’est bien là ce que Kurt Cobain avait compris : le barré, c’est tous les accords à portée de main. Ça vaut bien quelques contorsions et quelques douleurs.
Kurt qui, d’ailleurs, s’est autorisé quelques approximations lors du MTV Unplugged en 1993. « If it sounds bad, these people just gonna have to wait » (« si ça sonne mal, ces gens devront attendre »), prévient-il en amorce du morceau Pennyroyal Tea… Comme quoi un si bémol majeur qui grince un peu n’entrave pas la beauté d’une chanson.
Mais quand on n’est pas Kurt Cobain, la meilleure façon d’apprendre à faire des barrés est probablement de ne pas contourner cet écueil… Jouons quand même, comme lui, cet accord barré qui nous complique la vie, même si ça sonne mal dans un premier temps. Au bout d’un moment, si tout se passe bien, la main gauche s’habituera aux enchaînements, et ô miracle, gagnera en dextérité et en souplesse…
Digression : le cas Peter Buck
« Peter Buck n’a jamais su (pu ? voulu ?) jouer un barré de sa vie. »
Cette phrase glanée dans la presse rock du début des années 90 est-elle vraie ? En pinaillant, on pourrait dire que quelques (rares) photos lui donnent tort, mais elle l’a sans doute été au début, quand son groupe R.E.M n’était pas encore le groupe de stades au succès planétaire qu’il est devenu par la suite.
Ce qui compte ici, c’est qu’en contournant cet écueil, par un jeu fait d’arpèges, et d’usage immodéré des cordes à vide, il élabora un style très personnel et carillonnant qui fut la marque de fabrique du groupe.
Alors ?
Ne pas baisser les bras… Après tout, la batterie, le piano, et même l’équitation et la planche à voile, ont d’autres écueils. Et la relative patience que celui-ci demande ne manquera pas de porter ses fruits… Alors, courage !
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